L’hyper activité chez le chien

Le suivi de la prise en charge d’Orko va me permettre d’aborder un sujet très polémique, le chien hyper actif. On a aujourd’hui tendance à mettre ce terme à toutes les sauces, et dès que les chiens sont particulièrement nerveux, vigilants, réactifs, ils sont étiquetés hyper-actifs, sans tenir compte de leur génétique, leur éducation, du milieu dans lequel ils évoluent…

Le syndrome Hs-Ha, Hypersensibilité-hyperactivité est une maladie, et à ce titre doit être diagnostiqué par un vétérinaire, avec une prise en charge médicale. Mais en aucun cas, elle ne peut se suffire à elle-même, et doit être accompagnée d’une rééducation comportementale, impliquant toute la famille. Selon la forme et le degré d’intensité du syndrome, la médication peut être temporaire, juste le temps de réussir à fixer l’attention du chien, afin de lui permettre de se poser et d’apprendre une autre façon d’être.

Mais voyons l’histoire Orko, berger allemand mâle de 2 ans ½,  48 kg.

A notre premier rendez-vous, j’ai vu arriver une voiture qui bougeait dans tous les sens, avec un chien sautant et hurlant à l’intérieur. Le coffre à peine déverrouillé, une flèche noire a bondi pour se précipiter droit devant lui, entrainant, en volant, sa pauvre propriétaire. A la seconde où il s’est aperçu qu’il était en laisse, il l’a saisie et s’est arc-bouté dessus, en tirant de toutes ses forces. Il a alors entendu le moteur d’une voiture, s’est fixé dessus, est devenu hystérique à son passage, avant de se rendre compte que j’étais là, de me dire bonjour façon bulldozer, pour finalement se jeter sur une flaque d’eau. Le tout en moins de 2 minutes…

J’ai alors mis une longe à Orko, pour lui permettre de rebondir partout sans arracher le bras de sa maîtresse à chaque seconde, et j’ai enfin pu la saluer !

Elle me raconte son histoire et son quotidien. Orko est un chiot unique, né sans aucun frère et sœur, sevré très tôt. Il vit dans une famille sans animaux, et a toujours été très speed. Les sorties sont quasi impossibles, il est infernal en voiture, ne tient pas en place, ne tolère pas la laisse. Il n’est pas envisageable de le lâcher, puisqu’il se précipite sur tout ce qui bouge, se met en danger et est très impressionnant. Il fait une démonstration d’agressivité démesurée à la vue d’un congénère, que ce soit derrière un portail, ou aussi loin qu’il en aperçoit un en balade. Chaque minute avec lui est épuisante, et Géraldine a terriblement peur qu’un jour, avec son poids, sa force et sa nervosité, elle ne puisse le retenir.

On va alors commencer par un travail classique de concentration sur l’humain, de désensibilisation, d’acceptation de la laisse, de mise au calme… Bien entendu, des changements sont à faire à la maison aussi.

Si des progrès apparaissent au fil des séances, force est de constater qu’on doit souvent tout reprendre du début, que les temps de concentration sont quasi inexistants, et le calme impossible. A la maison, Orko ne dort jamais en journée, il est en vigilance et en mouvement constamment, en hyperventilation, ne prend même pas le temps de manger tranquillement. Je demande alors une consultation vétérinaire, et sans surprise, le diagnostic tombe, Orko est atteint du syndrôme Hs- Ha. Ma super-Vet met en place un traitement par bourgeons, moins invasif que les psychotropes. Le but est d’arriver à fixer l’attention du chien, de lui permettre de prendre le temps de réfléchir, et d’améliorer son filtre sensoriel. Pour l’heure, tout est stimulus, avec un même degré d’intensité. Orko ne peut fixer son attention, tout ce qui se passe autour de lui prend une ampleur démesurée, et n’importe quoi le déclenche, sans aucune gradation.

Le travail est long, il faut savoir se contenter de progrès infimes, et accepter les régressions fréquentes, mais Géraldine va s’impliquer d’une manière remarquable, dépasser ses angoisses et faire preuve d’une immense patience. Et on avance !

Orko accepte la laisse, arrive même à marcher calmement (s’il n’y a pas d’élément perturbateur), il peut se concentrer et rester assis le temps d’ouvrir ou fermer la voiture, ne se jette plus sur un bâton qu’on tient dans les mains, ne réagit absolument plus aux voitures qui passent au loin, et surtout a un suivi naturel et une observation permanente des mouvements de sa maîtresse. Autant de petits riens qui sont d’immenses progrès !

Il est temps de passer à l’étape suivante, le rapport à ses congénères…

Pour mémoire, Orko est complètement désocialisé, et fait montre d’une impressionnante agressivité, aussi loin qu’il voit un autre chien. Là encore, on va prend tout le temps nécessaire, en travaillant sur de grande distance, en maintenant la concentration, et surtout, en ne faisant jamais rien qui lui fasse peur.

Les chiens présentés sont choisis en fonction de leur caractère, et de leur capacité à gérer l’émotion que peut déclencher cette grosse furie lancée à plein régime ! Orko n’a  pas une once d’agressivité, mais ne gère aucune émotion, et fait tout avec la délicatesse d’un troupeau de gnous lancé  au galop. Il est hors de question de traumatiser le chien en face.

On va donc lui présenter Onyx, parfaitement capable de mettre un stop à une arrivée trop massive, mais sans énervement. Passée la première seconde d’inquiétude, Onyx va s’attacher à communiquer avec Orko, qui apprend très vite!

Chaque semaine, on lui propose des chiens très diférents, afin d’observer ses capacités d’adaptation, et de rassurer Geraldine sur sa communication. 

Place cette fois à Rangoon, jeune boxer mâle, entier et débordant, et Mishka, femelle husky à cheval sur le respect de son espace.

La présentation avec Rangon est bruyante et remuante ( bravo Mathilde pour les photos ! )

On va ensuite multiplier les rencontres, jusqu’à pouvoir l’intégrer à n’importe quel cours collectif, quelques soient les chiens en présence, mâles ou femelles, stérilisés ou non, petits ou grands, en laisse ou en liberté… Orko apprend très très vite, et prend manifestement beaucoup de plaisir !

Voilà, le plus gros du travail est fait, Orko est calme chez lui, peut se balader et galoper quotidiennement avec une bipède tout sourire,  a des interactions régulières avec des congénères qui lui font le plus grand bien! 

Reste à travailler la marche en laisse dans des endroits très stimulants, et l’acceptation des voitures sur des routes étroites, mais je ne doute pas une seconde qu’il va encore nous épater !

Immense merci à Mathilde Cordiez pour toutes ses photos !

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